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Chocolatine, poche et gavé : ces mots qui font l’identité bordelaise

À Bordeaux, on a la Garonne, le vin, les huîtres du bassin et surtout… une façon bien à nous de malmener le dictionnaire français. Et on ne s’en cache pas. Pendant que le reste du pays se moque (souvent avec l’accent pointu des Parisiens), nous, on rigole gavé bien. Alors, sortez vos carnets de notes, voici le guide de survie linguistique spécial Bordelais.


La chocolatine

Évidemment, on attaque direct par LE sujet qui fâche : le pain au chocolat. Mais attention, à Bordeaux, si tu dis “pain au chocolat”, tu risques de finir exilé à Poitiers. Ici, c’est chocolatine, point barre. On n’a même pas besoin de débattre : c’est scientifique, génétique et presque inscrit dans les statuts de la région Nouvelle Aquitaine. Le matin, on achète donc une chocolatine, qu’on mettra… dans une poche.

À Bordeaux, on ne parle pas, on invente : chocolatine, poche, “faire key”… Un lexique décalé, drôle et assumé qui défie la prononciation classique française

La poche

Ah, la fameuse ! Partout ailleurs, c’est un sac en plastique. À Bordeaux, non. Ici, on demande une poche. Tu veux ta chocolatine ? Dans une poche. Ton pack de bières pour l’apéro ? Dans une poche. Ta dignité après une soirée trop arrosée aux Chartrons ? Toujours dans une poche. Et on n’a même pas honte.


La malle

Et cette poche, devinez où elle finit ? Dans la malle de la voiture. Oui, ailleurs on dit coffre, mais nous on aime voyager dans le temps, façon diligence du XIXe siècle. Rien de plus normal que de charger la malle avant d’aller “faire de l’essence” (oui, on y revient).


Faire de l’essence

Les Bordelais ne se contentent pas d’en consommer : ils en fabriquent ! “Attends, je vais faire de l’essence.” Eh oui, dans nos esprits un peu mégalos, on a carrément l’impression de bosser à la raffinerie. L’autonomie énergétique mondiale ? C’est pour bientôt, grâce à Bordeaux.


Le son “un/hein”

Alors là, on est tatillons. En France, beaucoup prononcent “un” et “hein” de la même façon. Pas nous. Nous, on tient à la nuance, parce que sinon ça peut mener à des confusions monumentales. Exemple véridique : une Parisienne me dit “je dois faire une prise de sang à jeun”. Moi, j’entends “à Agen”. Résultat, j’imaginais déjà le CHU de Lot-et-Garonne surbooké de Parisiens en manque de fer. Merci l’accent.


Rose, ou plutôt “rause”

Chez nous, le “o” a décidé de vivre sa meilleure vie. Résultat, rose se transforme en rause. La ville rose ? La “ville rauze”. Une culotte rose ? Une culotte “rause”. Et franchement, ça a un petit côté glamour qui vaut bien une pub parfumée de Dior.


L’incontournable gavé

De la “malle” au “rause”, en passant par le mythique “gavé”, Bordeaux réinvente les mots du quotidien avec humour et fierté. Une langue vivante, chantante !

Le mot préféré des Bordelais, utilisé dans absolument toutes les sauces. Ici, tout est gavé : on est gavé contents, gavé bourrés, gavé fatigués… Et non, ça n’a rien à voir avec les canards du Périgord. C’est juste qu’on aime en faire trop. Gavé trop.


Ça daille

Traduction : “ça craint”. Une phrase qu’on sort facilement dans les embouteillages monstres du pont Chaban-Delmas, ou quand on découvre le prix d’un verre de vin dans certains bars branchés. Autant dire qu’à Bordeaux, ça daille souvent.


Faire key

Encore une perle locale. “Faire key” veut dire “faire attention”. Exemple : “Fais key, tu vas renverser ton verre de Bordeaux rouge sur le canapé blanc de mamie.” C’est l’équivalent d’un code secret : on ne sait pas vraiment d’où ça sort, mais on l’utilise avec sérieux.


Le -s de “moins”

À Bordeaux, on aime donner une seconde chance aux lettres oubliées. Donc le “s” de moins, on le prononce. Pas question de le laisser moisir dans un coin du dictionnaire. Ici, on lit ce qu’on écrit, ça s’appelle du respect, messieurs-dames.

Découvrez le parler bordelais, ses expressions savoureuses et ses mots revisités : entre chocolatine, poche et “enki !”, la langue française prend un délicieux accent local.

L’expression magique : “Enki !”

Attention, chef-d’œuvre du patrimoine linguistique bordelais. “Enki !” peut se traduire par un florilège d’insultes fleuries : de “punaise” à la version bien plus vulgaire qui commence par “encu-”. Le Bordelais le balance partout : “Enki, il pleut encore !” ou “Enki, j’ai renversé mon verre de vin !”. Bref, un indispensable.


Conclusion : un dictionnaire entier

Entre les chocolatines dans les poches, les mall es pleines d’essence et les “rauses” à gogo, parler bordelais, c’est un peu comme boire du bon vin : ça demande un petit temps d’adaptation, mais après, on ne peut plus s’en passer. Alors la prochaine fois qu’un Parisien se moque de toi parce que tu dis “ça daille gavé”, réponds-lui avec fierté : “Enki, fais key, tu vas finir dans la Garonne !”

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